En quittant la Gomera,
nous partons le cœur léger pour 5 à 6 jours de mer, le long des
côtes mauritaniennes et sénégalaises, pour nous diriger vers
l’étape africaine de notre périple. Nous voguons pour le Saloum,
avec dans nos bagages, les colis, les envies et le travail de long
mois à Thorigné, avec un passage à Dakar que nous envisageons de
3 à 4 jours.
Le départ est lent, avec
très peu de vent au sud des Canaries, nous obligeant à mettre
quelques heures le moteur. Le vent monte progressivement et nous
voilà partis à la voile. Le matin du deuxième jour, le pilote
automatique du bateau ne répond plus. On regarde, on teste, on
appelle, on diagnostique..le moteur de la pompe hydraulique, qui
24/24, veille sur la trajectoire du bateau, ne fonctionne plus. Alors
test et re-test : rien, nada ! Il faut se résoudre à
barrer jusqu’à Dakar, et le téléphone satellite aidant, on
commande la pompe depuis le bateau…avec l’espoir de la
réceptionner rapidement à Dakar.
Pendant ce temps, le vent
monte et, au large du Cap Blanc, nous passons à 2 ris et solent
réduit, par 30 nœuds de vent, des grands surfs, une mer formée…Ewen
prend plaisir à barrer et à passer quelques heures au-dessus de 10
nœuds…puis le vent, et bientôt la mer se calment et nous voila
au nord de Dakar par une mer d’huile. 100 dauphins nous
accompagnent et entourent le bateau. Belle récompense pour ces
heures au poste de barre…
Nous contournons la pointe
des Almadies, en croisant des pirogues, des hommes plongeurs seuls au
milieu de l’eau !...une veille attentive est obligatoire
..nous découvrons les îles de la Madeleine et de Gorée puis la
baie de Hann…..nous posons l’ancre, et bientôt le pied sur le
ponton, le pied en Afrique noire.
Après la première nuit
de repos, nous partons vers l’aéroport…et là, on prend une
grande gifle !
Nous changeons de
continent, et ce trajet à l'aéroport pour récupérer nos visas est
notre premier contact avec l'Afrique, ses couleurs, ses odeurs,
l'apparente anarchie qui préside, sur et à coté de la route. Les
charrettes à bras croisent les mini-bus collectifs, parfois doublés
par de beaux 4x4. Les passages au-dessus des voies ne servent pas
puisque les gens traversent à pied, leur chargement sur la tête ,
la voie rapide.
Après l'aéroport, la
douane, puis la police, nous délivrent les papiers, gentimement, et
beaucoup plus vite que ce que nous imaginions. Nango, notre taxi,
nous re-dépose au CVD dont le calme contraste avec les tumultes de
la cité sénégalaise. Nous voilà donc avec nos papiers en règle.
Il ne reste plus qu'à finaliser l'arrivée de notre pompe. Après
quelques mails et appels téléphoniques, elle serait dans l'avion le
vendredi 25. Nous prenons donc rendez-vous avec les instituteurs de
Roffangue et de Baouth pour l'achat des fournitures scolaires, ils
arriveront mardi 29.
Après ce premier parcours
initiatique, et en attendant le moteur et nos instits, nous
enchainons les visites des marchés aux poissons, aux fruits et légumes, aux objets artisanaux divers. Nous sommes les seuls blancs
harcelés de toute part, souvent dans la bonne humeur, parfois avec
beaucoup trop d’empressement….bref, c’est juste épuisant et
on est heureux d’y être allé et de retourner à notre camp de
base, qui arrive comme une bouffée d’air, après le tumulte de la
ville.
Ici, c'est à dire le
Cercle de Voile de Dakar, a un petit air de camp retranché, avec ses
habitués, arrivés et jamais repartis, de locaux compétents,
manquant de matériel mais avec du savoir faire et de la
débrouillardise. Avec aussi ses mamas, qui vendent légumes, tissus,
beignets, nougats, assurent le lavage du linge etc... Des gens
attachants, de belles rencontres. On se fond dans le paysage, avec
Daniel et Noëlle arrivés un jour avant nous et en mission pour
VSF.
On organise nos visites,
et c’est vers le Lac Rose que l’on se dirige. Le passeur est
incroyable. Il nous fait traverser le lac à 10 dans une barque
utilisée par les ramasseurs de sel, qui des heures durant, extraient
le sel de ce lac qui doit être rose, et qui fit les belles heures de
l’arrivée du Paris - Dakar. On en verra malheureusement pas la
couleur...du Lac, qui reste bleu, faute de vent et de trop d'eau
douce après la saison des pluies.
Belle journée que nous passons
là, notre passeur nous fait rire, disant que sa mère lui interdit
de se baigner et qu'il l'a toujours écoutée car « une
mère sait voir loin alors que toi, même en haut d’un arbre, tu ne
vois rien » et, surpris que nous soyons venus au Sénégal en
bateau, il « nous demande si on navigue avec des catalogues »
..un florilège !
Sur les conseils du centre
équestre voisin du CVD, Juliette, Solène et Cécile (au pas
derrière) font une magnifique balade dans les dunes et sur la plage
qui s'étend de Dakar à St Louis.
Les autres se laissent flotter
dans les eaux du lac, plus salé (380mg/l) que la mer morte. Ce qui
est surprenant, c'est la chaleur du sel au fond, impossible de poser
ses pieds dessus.
De retour de cette belle
balade, nous apprenons que notre moteur que nous attendions le
lendemain, n'est pas encore parti et qu'il arrivera le lundi 4
novembre, quelle déception! Nous avons encore trop fait confiance et
on continue à apprendre la patience !
Nous accueillons donc
Karamba et Fodé, le mardi midi. Nous mangeons ensemble au CVD, mais
le trajet les a épuisés et nous les retrouvons le soir pour manger
au bateau . Les échanges sont intéressants. On les assaille de
questions, et nous comprenons mieux leur façon d'enseigner avec 40
enfants par classe et 2 niveaux. Les enfants sont accueillis jusqu'à
Noël, où leur effectif définitif est connu. Cela laisse le temps
aux parents de réfléchir si l'école est importante et aux instits
de faire comprendre la nécessité d'apprendre à lire.
Le lendemain les
instituteurs, Juliette et Cécile partent de bonne heure, pour le
marché Sandaga au centre de Dakar pour faire les achats de fournitures scolaires. Le premier
vendeur est très bavard mais ne veut pas baisser ses prix. Est-ce
notre présence blanche qui le persuade qu'il aura plus d'argent ?
Possible, alors pour changer de boutique nous laissons Fodé et
Karamba seuls et nous allons faire quelques achats au Casino
achalandé de produits alimentaires français.
Quand nous retrouvons Fodé
et Karamba, les affaires sont conclues mais il faudra bien 2 heures
pour rassembler les 105 …....et faire les paquets.
Fatigués par tant de
négociation, Fodé et Karamba reportent leur cours d'excel au
lendemain matin. Ils utilisent word, mais n'ont jamais ouvert excel.
Ils doivent cependant remettre tous les mois des comptes sur la
gestion de l'école car ils sont aussi les directeurs. La tâche est
ample, ils apprennent à faire des moyennes, des sommes.... à
recopier des cellules...Il leur faudra encore quelques heures
d'entrainement mais c'est un bon début, ils sont ravis.
Ils embarquent le soir sur
le bateau de Daniel qui part aux aurores pour le Siné Saloum. Nous
restons à terre et sommes ravis de revoir William, Isabelle et leurs
enfants arrivés le matin.
Nous décidons de visiter
ensemble la réserve de Bandia à 60 Km de Dakar. Magnifique après-midi où nous avons pu observer girafes, zèbres, buffles, singes
verts et rouges... et 2 rhinocéros en pleine nature, au milieu des
acacias, des baobabs... Notre guide est un vrai conteur.
Le retour par
la nationale nous permet de voir encore tous ces chapelets de
micro-boutiques qui longent les routes où se rassemble une multitude
de monde pour vendre, pour discuter, se reposer. Un merveilleux
spectacle riche en couleurs.
Mais 15 jours, c'est largement assez, car le compteur tourne et nous avons encore de la route pour aller au Saloum, visiter le Cap vert,...avant notre transat qui se profile dans un mois!