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dimanche 20 juillet 2014

LA TRANSAT RETOUR : Açores-Golfe du Morbihan


Quai de Horta, lundi 8 juillet 2014, les gestes sont précis, rapides et coordonnés. Les amarres sont une à une retirées, seule la garde nous retient encore à la terre.



Juliette est à la bouée arrière, moteur tribord en marche arrière, encore lié quelques secondes par la garde, le bateau pivote doucement sur le plan d'eau lisse de la Marina. Ce quai que nous arpentons depuis un mois s'éloigne. Il est 10h du matin et nous quittons la dernière île de notre périple avant nos îles bretonnes et bientôt notre maison, notre famille et nos amis. Açores-Bretagne,1250 MN en ligne droite, est loin d'être la plus longue traversée, pas forcément la plus simple pour la mer et la météo, mais c'est la dernière pour cette boucle atlantique entamée depuis 11 mois. On veut en profiter, entre l'envie de pouvoir marcher demain sur la plage de Hoedic, puis bientôt embrasser nos proches et l'envie de continuer cette vie sur l'eau qui nous plaît tant. Le livre n'est pas refermé mais on entame la rédaction du dernier chapitre.
On mesure, ce matin de juillet, le chemin parcouru depuis le départ le 12 août dernier, tant sur la façon de mener le bateau, de faire les manœuvres : jeter l'ancre pour la 100ème fois, envoyer la GV ou prendre un ris, que de vivre ensemble pendant des jours, dans un espace confiné sans espoir de s’échapper. De tout cela, nous ne savions pas grand chose au départ, nous avons encore beaucoup à apprendre, mais tout le monde à bord a acquis suffisamment d'expérience pour que ce départ soit la promesse d'une belle navigation ensemble au long court.
On sait déjà que la météo devrait nous permettre de bien profiter en allongeant la durée sur l'eau, car on part dans la pétole la plus complète. Il nous faut contourner l'anticyclone installé sur le nord des Açores, puis remonter au près dans du tout petit temps avant d'espérer faire route vers le Golfe du Morbihan. Nous avons ce qu'il faut dans les soutes pour faire fonctionner le moteur 5 à 7 jours et se nourrir presque tout l'été, mais ce n'est pas une raison pour le passer sur l'eau.

Après une première journée au moteur, puis sous SPI, puis au moteur, nous touchons du vent et commençons à remonter, tangentant les calmes anticycloniques, en profitant de la puissance du code zéro, qui dans les petits airs, apporte, au près, un surcroît de vitesse épatant. On espère aussi voir des baleines, des dauphins, nombreux dans ces eaux. Tous ceux que nous croisons viennent et repartent, occupés sans doute à chasser, à moins que la couleur grise de notre antifouling guadeloupéen ne les repousse. Bref, Zen n'a pas beaucoup de succès avec les cétacés açoriens et on se réjouit déjà de retourner vers le golfe de Gascogne qui nous avait comblé l'an passé avec moult amis dauphins qui nous ont accompagnés très souvent.
La lente remontée est très propice. Propice à l 'énervement après 5 virements de bords nous ayant permis de ne pas progresser sur la route directe en 5 heures, propice aux petites réparations d'une monture qui vient de parcourir 15 000 MN et qu'il faut ménager car on veut aller encore loin, propice aux jeux de société, de cartes, à la lecture et au visionnage de films, propice à la cuisine car cette fois, pas de restriction de gaz, propice aux premiers bilans du voyage : des escales, du Cned, des choix techniques, des si c 'était « à refaire je mettrais quoi pour l'énergie » etc..., enfin propice aux discussions de « qu'est-ce qu'on fait t'on à la rentrée », les sujets collège, lycée et boulot, noyés dans l'eau chaude et turquoise des Bahamas, ressortent dans les brumes humides de l'Atlantique nord. Partage et complicité du bord, ces moments sont comptés, donc on en profite...

Ce n'est cependant pas une sinécure de rentrer par cette route maritime qui nous entraîne sous des latitudes que notre cerveau, ramolli par une température eau/air constante de 27°C, avait totalement oublié. Le choc est progressif avec l'arrivée aux Açores, sa pluviométrie bretonne et les brouillards à cacher le plus haut sommet du Portugal pendant des jours, puis l'anticyclone éponyme, que l'on imagine traverser sous une chaleur estivale et qui s'avère abriter des calmes plats maléfiques pendant lesquels on redoute à tout moment d'entendre le chant des sirènes, puis vous recouvre d'une brume humide et froide, alors que vous naviguez sur une eau si froide (16°C) que même le Gulf stream a renoncé à venir la réchauffer. Autre preuve si nécessaire : les poissons, ils sont partis. Pas de pêche, le poulpe rose, qui a tant pêché Seigneur ! n'est jamais courtisé. Fini les préparations de poisson cru, on garde le citron pour se faire des grogs ! Bref, candidats aux voyages, ne faites pas la même erreur que ZEN, qui depuis les Caraïbes, se gèle dans les eaux quasi polaires de l'Atlantique en remettant le chauffage pour faire disparaître l'humidité et la froidure : mettez le cap à l'ouest ! On nous a dit qu'il existait un petit passage que Ferdinand de Lesseps avait, en son temps, tenté de creuser et qui permettrait d'aller dans des eaux si belles que la décence m'interdit ici de décrire, sachant que la grande majorité de nos lecteurs, comme nous-mêmes, n'a plus que quelques jours à vivre avant que le blizzard ne vienne à nouveau recouvrir les landes bretonnes, plongeant les populations dans ce que d'aucuns appellent l'hiver, période difficile que nous n'avons pas rencontrée depuis 1 an, sans que cela semble nous manquer, sauf pour le Ski....mais je m'égare.
Le 11 juillet, nous arrivons enfin dans une zone de vent portant, permettant de remonter honorablement par 10/15 nds vers 47 de latitude nord, soit à hauteur de la Bretagne. Nous renonçons à faire encore plus route au nord, jusqu’à la latitude de Falmouth ! 1/ parce que ça fait beaucoup de route en plus pour aller chercher du vent et 2/ c'est dur pour le moral de se dire que l'on fait cap sur une île qui, certes, fait partie du Commonwealth, mais dont les eaux sont froides et les pubs pleins de rosbifs. Compensation, c'est chouette d'avoir sur la carte de l'ordinateur, le contour de la Bretagne comme prochaine destination, alors que depuis des mois, chaque destination était une inconnue, une découverte. A me relire, je ne suis plus si certain de classer cela dans les avantages....
Le vent bascule au sud ouest, jour de fête nationale et nous empannons, cap à l'Est et entamons les 400 derniers miles de notre aventure familiale.
L'hydrogénérateur a décidé de ne plus produire cette énergie qui assurait plus que notre consommation, permettant tous les excès de lumière, d'ordi etc... le câble, en partie sectionné par le support et réparé hier en est peut-être la cause ? (mais il y a du boulot chez Watt & Sea pour améliorer tout ce qui entoure la super génératrice, comme la mise à l'eau de l'engin, la protection du cable …). Ceci rejoint la sangle de GV en partie déchirée, le bas du solent usé par le raguage, ou l'antenne VHS à nouveau décrochée...

Usure des semaines de navigation qui nous invite à des heures de bricolage et de remise en état à chaque escale: maintenant, nous devrions avoir le temps, la prochaine est la plus longue.....
Cette nuit, et pour la première fois depuis des jours, l'AIS montre plusieurs navires amis sur l'écran, même un voilier Rosbif rentrant au pub ! Le rail d'Ouessant et la terre bretonne se rapprochent, même si l'odeur de la lande foulée par les korrigans, qui se réchauffe avec les premiers rayons du soleil, ce n'est pas encore pour tout de suite. A l'aube, la mer est lisse, la houle longue et faible et le soleil tente une percée à travers la couche de stratocumulus qui nous protège de ses rayons presque toute la journée. La bateau glisse sous genaker à 5,5 Nds pour 6,5 de vent réel quand les dauphins, les sympas du Golfe de Gascogne, viennent nous saluer, restant 30 mn, jouant avec le bateau : c'est un peu comme le bleu des Bahamas, il faut garder ces images au fond de notre rétine, pour réchauffer nos cœurs dans le blizzard à venir.


Le vent finit par s'échapper et nous continuons au moteur sur une onde lisse. Ewen monte en haut du mat pour refixer l'antenne dévissée, nous essayons toutes les voiles possibles, pour se résoudre à préparer le code zéro pour les jours à venir au près et passer le rail d'Ouessant au moteur. Le trafic s'intensifie sur l'écran et c'est une autoroute de véhicules de 100 à 300m que l'on croise bientôt. L'AIS est formidable dans ce contexte, nous donnant la position, la vitesse et le cap (et aussi l'âge du capitaine) au m près. Une fois traversé l'autoroute, on s'attend à un peu de vent de près, léger et très vite du portant, trop cool. Mais c'est pendant 12 heures un vent contraire, que nous enregistrons jusqu'à 25Nds, et une mer formée, contre nous, qui nous cueille à froid (très froid même...). Il faut donc lutter face au vent, le bateau est secoué, a beaucoup de mal à garder un près serré dans ces conditions. A tel point que j'appelle le Sémaphore de Belle-île pour savoir s'il n'y a pas un changement dans les prévisions que je n'aurais pas vu venir, genre tempête tropicale venu se refroidir sur nos côtes. Et en fait rien, il n'y a qu'à réduire la toile, tirer des bords et attendre que la prévision se réalise.
Au petit matin, la mer s'est calmée, le vent est tombé et c'est bientôt le phare de Groix qui nous annonce l'arrivée prochaine, une des dernières bouées de parcours, promesse d'une transat réussie et de la fin annoncée de notre navigation familiale autour de l'Atlantique, bonheur d'avoir mené ce projet au bout, joie des retrouvailles et pas pressés de mettre le pied à Terre. Le bateau glisse sur l'eau, le courant entre la Teignouse et Belle-ile nous porte, tout le monde dort. Je profite, seul sur le pont ce matin, de ces moments de lever de soleil, de pêcheurs matinaux, de ces mouettes venues nous saluer, de la sensation merveilleuse d'avancer dans le calme, à 6 nds par 6 nds de vent. ZEN me ravit, encore. Il aura été solide hier dans la tempête, rapide dans le souffle matinal, il arrive plus en forme qu'il y a un an (Nous pareil!) et pour nous tous, il aura fait un « sacré boulot » !!! J'en profite, à Donf....
Hoedic est face à l'étrave. 12 Aout 2013-18 juillet 2014 : La ZenTeam est de retour, avec un petit sas à Hoedic, d'où nous étions partis il y a un an. Nous n'étions pas là depuis une heure quand les Douanes nous rendent visite. Un avion nous a survolé quand nous sommes rentrés dans les eaux territoriales françaises et ils nous attendaient.
Nous profitons de cette journée pour se baigner (Aie, 16°C!!!), ranger, laver...tout en surveillant d'un œil les plaisanciers qui arrivent dans la baie avec l'envie de mettre l'ancre juste à côté de nous : dire qu'aux Bahamas, on avait 3 kms de plage pour nous tout seuls.
Nous levons l'ancre à 6h30 pour rentrer dans le Golfe avec le flot. Le soleil se découvre, le paysage grandiose et nous mettons notre grand pavois à nous (Tous les drapeaux des pays traversés) et nos T-Shirts confectionnés par Juliette pendant la traversée.


Nous pouvons ainsi faire honneur à notre comité d’accueil, qui se trouve sur la pointe de Bilgroix, juste après Port Navalo. Instant émotion. Nous nous offrons un second passage pour le plaisir, pour repartir bien vite, poussés par le fort courant à cet endroit.





Nous nous accrochons à la bouée, heureusement nettoyée la veille par le port du Logeo : merci Philippe. Pierre-Yves vient nous saluer, lui qui était venu nous accompagner en bateau à notre départ l'an passé. La boucle est vraiment bouclée, nous refermons ce livre, sorte de tome 1 de nos aventures maritimes...plus qu'à rêver au tome 2.

Avant cela, nous avons hâte maintenant d'embrasser la famille et de remettre un pied sur la Terre Ferme.

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